Une carrière consacrée aux producteurs de lait

Sylvie Gauthier travaille pour Les Producteurs de lait du Québec depuis 40 ans. Si le lait peut être livré chaque jour aux usines de transformation, c’est notamment grâce à elle. Elle partage avec nous quelques souvenirs de cette carrière consacrée au service des producteurs laitiers d’ici.

Sylvie avait 17 ans quand elle a été embauchée comme commis de bureau au service des Finances. C’était en 1982, c’est-à-dire quelques mois avant même la fondation de la Fédération des producteurs de lait du Québec, renommée plus tard Les Producteurs de lait du Québec. « La création de la Fédération était en train de se faire quand je suis arrivée. Je me rappelle que ça bougeait! Mais je n’ai pas vécu de grosse transition dans mon travail », se souvient-elle. Sylvie est par la suite devenue commis-comptable, puis commis-comptable junior. Elle poursuit : « J’ai un DEP en comptabilité, alors je pensais rester aux Finances toute ma carrière, mais un poste s’est libéré aux approvisionnements. » Une de ses collègues, qui travaillait déjà dans l’équipe des approvisionnements l’a convaincue de poser sa candidature. « Elle m’a dit : “Viens travailler avec moi, tu vas être bonne et on va avoir du fun”, révèle Sylvie. J’ai finalement eu le poste et, elle et moi, on travaille ensemble depuis 28 ans. »

Comme agente aux contrôles techniques, approvisionnement et transport, Sylvie planifi e le transport du lait des fermes aux usines en fonction de l’offre et de la demande. Elle explique : « Chaque semaine, on reçoit les réquisitions de lait des usines et les quantités de lait qui seront disponibles chez les producteurs. On dirige les citernes de lait vers les usines en respectant les règles des conventions de transport et de mise en marché. Par exemple, quand la demande est plus forte que la production, on doit fournir les classes prioritaires en premier. » Sylvie précise que les commandes des transformateurs et les quantités de lait disponible qui lui sont envoyées sont au départ des estimations. Le plan initial n’est donc jamais le plan final. « Il faut que je sois capable de travailler sous pression, parce qu’il y a beaucoup de changements de dernière minute. On a entre 200 et 300 modifications par semaine, explique-t-elle.

Sylvie travaille aussi régulièrement sur appel la fin de semaine pour régler des urgences, comme un feu ou un bris soudain dans une usine. « Parfois, le camion est déjà en route et l’usine ne peut pas recevoir le lait. Il faut trouver une solution, pas le lendemain, pas dans trois heures, c’est maintenant que ça se passe! », lance-t-elle.

La crise du verglas en 1998

Il y a, bien entendu, des urgences plus marquantes que d’autres. « La crise du verglas, c’était une grosse affaire, dit Sylvie. Quand la première usine, celle de Marieville, a fermé par manque d’électricité, on n’en a pas trop fait de cas. Mais après, on s’est mis à recevoir des appels des autres usines l’une après l’autre. C’était épouvantable. Le pire, c’est quand Saputo à Montréal est tombé. » Elle explique que d’un côté, plusieurs transformateurs n’étaient plus en mesure de recevoir du lait et que, de l’autre, plusieurs fermes étaient inaccessibles parce que les camions ne pouvaient plus passer dans les rangs. « Chaque jour, il fallait évaluer ce qu’on pouvait ramasser et où on pouvait l’envoyer. C’était tout un défi! On finissait de travailler tard et souvent à la lampe de poche », se rappelle-t-elle.

Sylvie précise qu’elle et sa collègue ont eu besoin de renfort pour passer à travers cette crise. « Beaucoup de personnes dans l’équipe nous ont aidées. C’était vraiment la priorité. », dit-elle.

Sylvie habite la Rive-Nord, elle avait donc de l’électricité chez elle durant cette période. Mais ce n’était pas le cas pour sa collègue qui habitait dans le fameux triangle noir en Montérégie. « Elle était coupée du monde, si on veut. J’ai décidé de l’aider. J’ai appelé ma gardienne, je lui ai demandé si elle pouvait prendre une enfant de plus. Elle a accepté. Après, j’ai appelé ma collègue et je lui ai dit : “Fais tes bagages, tu t’en viens rester chez nous avec ton chum et ta fille”. On a cohabité pendant trois semaines environ », se remémore Sylvie. « Comme quoi, ajoute-t-elle, les collègues deviennent souvent plus que des collègues. Il y a des gens qui m’ont beaucoup aidée dans ma vie, alors maintenant je donne au suivant. »

Du papier au numérique

Quand on lui demande ce qui a le plus changé dans l’organisation au cours des 40 dernières années, elle répond sans hésiter : « la technologie ». Elle précise : « Avant, on faisait tout à la main : les paies et les corrections de paie des producteurs entre autres. On avait d’énormes piles de papier. Une fois nos documents remplis, on les envoyait au service informatique de l’UPA où des gens avaient comme emploi de les retaper. » Les ordinateurs ont ensuite peu à peu été intégrés dans les locaux. « On a commencé par avoir un ordinateur cathodique par département, et aujourd’hui, on fait du télétravail. On est même passés au zéro papier en 2020 durant la pandémie », résume Sylvie. Est-ce que tous ces changements ont été positifs au bout du compte? « On pensait que l’arrivée des ordinateurs allait nous alléger la tâche, mais finalement ça nous donne plus de travail », dit-elle en riant.

Un emploi qui évolue

Au fil des années, des changements règlementaires dans l’approvisionnement et le transport du lait sont venus changer le quotidien de Sylvie. « C’est comme pour l’arrivée des technologies, il faut savoir s’adapter », dit-elle. Sylvie poursuit : « Les obligations de déplacement de lait des provinces de P5 font en sorte que maintenant on a plus de camions à déplacer de l’est vers l’ouest. On reçoit des camions des Maritimes et on envoie des camions du Québec vers l’Ontario. C’est un approvisionnement en cascade, si on veut. »

C’est aujourd’hui de plus en plus rare de célébrer 40 ans de travail au sein d’une même entreprise. Sylvie se souvient : « J’ai vécu tous les moments importants de ma vie, comme mon mariage et la naissance de mes enfants, en tant qu’employée aux PLQ. C’est quelque chose quand même. » Et pourquoi a-t-elle choisi de rester aux PLQ? « J’avais besoin de stabilité. J’aime aussi ce que je fais. Même après toutes ces années, je pense que je m’investis autant qu’au début. En tout cas, je n’ai pas perdu l’intérêt envers mon métier », conclut-elle.