Réduire la quantité de mycotoxines, c’est possible!

L’été dernier a été propice aux mycotoxines dans le maïs et les céréales. Cette année, saurez-vous minimiser les problèmes grâce à de bonnes stratégies de prévention?

Au Québec, les principales mycotoxines pouvant affecter les bovins laitiers sont le déoxynivalénol (DON), la zéaralénone (ZÉA) et la T-2/HT-2. Ces mycotoxines sont produites par des moisissures du genre Fusarium qui proviennent majoritairement de maladies végétales chez le maïs et les céréales à paille. Les deux maladies les plus importantes causées par Fusarium au Québec sont la fusariose de l’épi et la fusariose de la tige.

La pluie joue un rôle important dans le cycle vital de ces deux maladies. D’abord, Fusarium a besoin de pluie pour produire des spores. Ces dernières peuvent se déplacer sur plusieurs kilomètres pour infecter un plant de maïs ou de céréales. Une fois que le plant infecté est récolté, des résidus contaminés se retrouvent au sol. L’année suivante, les précipitations contribueront de nouveau à la propagation de la maladie en créant des éclaboussures contenant des spores, qui peuvent infecter une plante sensible ayant poussé parmi des résidus contaminés.

Une année pluvieuse est donc synonyme d’un risque plus élevé d’infection par Fusarium. Dans plusieurs régions, il faut donc être attentif aux symptômes associés aux mycotoxines lorsque les animaux consomment du maïs ou des céréales produits à l’été 2023.

Les analyses dans votre coffre à outils

Lorsque des signes cliniques sont observés chez vos animaux (voir la figure 1), vous disposez de plusieurs analyses pour déterminer si les symptômes sont bel et bien causés par la présence de mycotoxines.

D’abord, il y a les analyses d’aliments, utiles pour vérifier la présence de mycotoxines dans la ration, ou encore pour identifier l’ingrédient problématique. Le défi de ce type d’analyse est d’obtenir un échantillon représentatif de la concentration réelle en mycotoxines. La rigueur du processus d’échantillonnage est une étape cruciale pour obtenir des résultats pertinents. Le site de Lactanet indique les procédures pour échantillonner les aliments secs et humides ainsi que les seuils préoccupants.

 

Figure 1 : Signes cliniques associés aux principales mycotoxines chez les bovins

Il est également possible de mesurer la teneur en DON et son métabolite (DOM-1) dans le sang des vaches avec l’aide d’un médecin vétérinaire. L’avantage de ce type d’analyse est que les vaches effectuent le travail d’échantillonnage des aliments à notre place, ce qui est plus simple et rapide que d’essayer d’obtenir manuellement un échantillon représentatif des aliments.

Une fois confirmé que la présence de mycotoxines a atteint des niveaux préoccupants, quelques solutions peuvent être envisagées, comme remplacer l’aliment contaminé, réduire son taux d’inclusion dans la ration, ou encore utiliser un additif alimentaire ayant la capacité de lier les mycotoxines. Malheureusement, ces solutions peuvent être difficiles à appliquer, coûteuses et pas toujours efficaces.

Il faut miser sur la prévention

Après avoir identifié le problème et trouvé des solutions à court terme, il est important de déterminer comment on pourra prévenir ce problème pour les années suivantes. Dans une étude publiée en 2021, des experts internationaux se sont réunis pour discuter de la gestion des problèmes de mycotoxines. Ceux-ci ont dû répondre à la question suivante : quelles sont les stratégies efficaces pour réduire la contamination par DON et ZÉA durant la croissance du maïs? Plusieurs stratégies ont été proposées, puis classées selon leur importance à la suite du vote des experts (voir la figure 2).

Parmi les 15 stratégies de la liste, plusieurs peuvent être regroupées. Le choix de l’hybride représente à lui seul 36 % des votes (hybride résistant à la maladie, adapté aux conditions locales, et pas trop tardif). L’absence de résidus contaminés représente 20 % des votes (rotation, gestion des résidus, labour). À elles seules, ces stratégies sont de loin les plus importantes et représentent 56 % des votes.

 

Figure 2 : Stratégies efficaces pour réduire la teneur en DON et en ZÉA dans le maïs avant la récolte (% des votes)

La génétique et l’absence de résidus contaminés : deux incontournables

On peut se demander si les hybrides de maïs vendus offrent une bonne résistance à la fusariose. Des chercheurs ont étudié la question et ont démontré qu’il existe une variabilité importante en ce qui a trait au taux de DON des hybrides de maïs cultivés au Québec dans les mêmes conditions1. Durant une année favorable aux mycotoxines, l’hybride le plus résistant à la maladie contenait de 0,03 à 0,27 ppm de DON, dépendamment du site à l’essai. L’hybride le plus susceptible contenait quant à lui de 2,25 à 4,93 ppm de DON. Pas étonnant que les experts accordent autant d’importance au choix de l’hybride!

Mais comment évaluer le degré de résistance à la fusariose? Dans le cas du maïs, il n’existe pas d’essai indépendant qui évalue ce paramètre chaque année. Il faut donc s’informer auprès du représentant de semences. Certaines compagnies évaluent la résistance de leurs hybrides à la fusariose de l’épi (aussi appelée pourriture de l’épi Gibberella).

Malheureusement, d’autres ne rapportent pas l’information ou évaluent des indicateurs très généraux qui ne sont pas spécifiques à la fusariose. Si votre entreprise est à haut risque quant à la présence de mycotoxines et que votre fournisseur n’a pas l’information sur le sujet, il faut vous demander si vous pouvez réellement vous passer de cette information. Pour les cultivars de céréales à paille, des essais indépendants sont effectués chaque année par le Réseau des grandes cultures du Québec. Plusieurs indicateurs sont évalués, incluant la résistance à la fusariose de l’épi. Évidemment, il ne faut pas oublier de choisir un hybride ou un cultivar adapté à nos conditions, et qui ne sera pas trop tardif.

Concernant les résidus de culture, deux principales stratégies peuvent être envisagées. La première est de s’assurer d’avoir une rotation qui évite la présence continue de cultures sensibles à la maladie. Si cela n’est pas possible, l’autre option est d’enfouir les résidus d’une culture sensible avant de semer une autre culture sensible dans le même champ. L’enfouissement doit se faire avec un labour pour être efficace.

Évidemment, le labour n’est pas une stratégie optimale pour les fermes souhaitant améliorer la santé de leurs sols en diminuant le travail du sol. Une bonne réflexion s’impose si vous êtes dans cette situation!

1 Farimani, N. P. (2014). Évaluation du contenu en mycotoxines de différents hybrides de maïs grain cultivés au Québec (mémoire de maîtrise). Université Laval, Québec.