Pour se changer les idées

Vous adonnez-vous régulièrement à une activité – sport, musique, etc. – qui vous fait « sortir » de la ferme? Voici deux producteurs et une productrice qui prennent leurs loisirs très au sérieux!

« Je sais que je suis intense »

En été, il fait du motocross à raison d’une vingtaine de sorties par saison. En hiver, il dévale les pentes de ski chaque fin de semaine. Daniel Veilleux pratique ses sports favoris avec assiduité. « Je sais que je suis intense », dit celui qui gère une exploitation détenant un quota de 415 kilos de matières grasses par jour.

Daniel, résident de Saint-Évariste, en Beauce, éprouve le besoin de s’échapper de la ferme : « Les sports, affirme-t-il, me font décrocher en un instant. Je les vois maintenant comme une nécessité. Sinon, ma santé mentale en serait affectée. »

On pourrait dire que ce sont ses trois filles qui l’ont entraîné vers le ski. Les cours qu’elles suivaient en bas âge, puis les compétitions auxquelles elles participaient ont conduit leur papa à fréquenter avec régularité le centre de ski du mont Adstock, situé à seulement vingt minutes de la ferme. « Un bon jour, l’envie m’a pris de faire moi aussi de la compétition », dit-il. Le retour du printemps amène le producteur de 44 ans à troquer ses skis pour faire du motocross. De l’endurocross, pour être précis. « C’est un type de motocross qui se fait dans des sentiers en forêt, explique Daniel. On roule sur du terrain très accidenté et on est souvent amenés à franchir des obstacles. »

Dans l’endurocross comme dans le ski alpin, il comble un besoin de se dépasser physiquement. « Je n’ai jamais été aussi brûlé qu’après une sortie que j’avais faite en moto », lâche-t-il. Pour les curieux, précisons que sa monture est un modèle Beta, de fabrication italienne, doté d’un moteur deux temps de 300 cc. « C’est une machine qui n’étouffe pas, précise le sportif, et qui a du torque à basse vitesse. »

Pratiquer ces deux sports ne vient pas sans risques. « Je me suis cassé une clavicule en ski en 2021, dit Daniel. Et il y a deux ans, j’ai dû suspendre ma saison de moto à cause d’une blessure à un coude. »

Il poursuit : « Dans les deux cas, j’ai été forcé de me tenir tranquille. Mais ça ne m’a pas affecté le moral, car je voyais qu’il y aurait un lendemain à ma blessure. »

Elle sait sur quel pied danser

« Avant 2018, raconte Monique Breton, on faisait beaucoup de voyagement pour les sports et les autres activités de nos quatre enfants. Puis, la petite dernière a passé son permis de conduire et là, je me suis dit : il est temps de penser à nous. »

C’est ainsi qu’elle et son conjoint, Martial Labrecque, qui exploitent une ferme à Saint-Bernard-de-Beauce, ont commencé à pratiquer la danse country en ligne. « Il y avait une salle près de chez nous, révèle Monique. Je passais souvent devant et je voyais qu’il y avait beaucoup d’autos dans le stationnement. Alors, j’ai proposé à mon mari d’essayer. »

Elle n’a pas tardé à attraper la piqûre. « Ce que j’aime dans cette activité, dit la productrice de 54 ans, c’est qu’on peut se lancer des défis. Apprendre de nouvelles danses, des danses de plus en plus compliquées. » Aujourd’hui, le couple sort danser trois ou quatre fois par semaine. À Saint-Bernard, toujours, mais aussi dans d’autres localités de leur région. « Ce sont les professeurs qui nous attirent, dit-elle. Et on aime rencontrer d’autres gens. »

D’autres motifs alimentent son intérêt pour la danse. « Danser, je trouve que c’est bon pour l’estime de soi, explique-t-elle. Dans notre métier, on travaille avec du vivant, les animaux, les cultures… en plus de devoir composer avec dame Nature. Parfois, nos projets fonctionnent, d’autres fois pas. Alors qu’en danse, il y a des défis et on sait que si on y met les efforts, on va réussir. »

« En plus, ça change les idées, poursuit celle qui exploite un troupeau de 85 vaches en lactation ainsi qu’un engraissement de 545 porcs. C’est important de voir autre chose. Quand on se change les idées, on revient à la ferme la tête reposée. Parce que ruminer un problème ne permet pas tout le temps de le régler. Je pense que grâce à la danse, on arrive au travail avec une attitude plus positive. Quand on a des petits troubles, on passe plus facilement au travers. Et la danse me donne de l’énergie, parce que c’est quand même assez physique. »

Récemment, elle a dû se faire remplacer les deux genoux par des prothèses. Mais cela n’a pas brisé son élan. « J’ai été forcée d’arrêter de danser pendant un an et demi, raconte-t-elle. J’ai recommencé graduellement à danser six semaines après la deuxième chirurgie. D’abord chez moi en regardant des vidéos sur YouTube, puis en salle. Maintenant, je me sens comme une neuve! J’ai plus de souplesse qu’avant. »

Quand on lui demande si elle doit tordre le bras de son mari pour sortir danser, elle pouffe de rire. « Il a encore plus la piqûre que moi, lance-t-elle. Il est plus perfectionniste et je pense qu’il aime le défi de maîtriser de nouvelles danses. »

Il a converti un garage en gymnase

Martin Daoust se sort la ferme de la tête sans que son corps, lui, en sorte. Façon de parler. C’est que ce producteur de Saint-André-d’Argenteuil, près de Lachute, est un adepte de CrossFit, ce type d’entraînement qui marie haltérophilie, gymnastique, sports d’endurance et autres exercices axés sur la force athlétique. Adepte au point où il a transformé un garage en un gymnase où il s’entraîne deux heures par jour. « De temps en temps, précise Martin, je vais au centre de CrossFit de Lachute ou d’une autre ville. Je me suis fait des amis partout. »

Adepte aussi au point de participer à des compétitions ici et chez nos voisins du sud. L’athlète s’attend d’ailleurs à participer aux CrossFit Games, qui sont en quelque sorte les olympiques du CrossFit et qui auront lieu en aout au Texas. « Je me retrouverai dans la catégorie des 45 ans, indique-t-il. Il y a 17 000 inscriptions et, compte tenu de mes performances antérieures, je m’attends à être un des 40 sélectionnés. »

Martin se décrit comme un sportif dans l’âme. « J’ai fait du sport toute ma vie, dit-il. Vélo, motocross, course à pied… Je voulais toujours participer à des courses et performer. » En 2016, il découvre le CrossFit. « Un aspect que j’adore dans ce sport, c’est la diversité des exercices, dit l’athlète de six pieds un pouce, 185 livres. Ce n’est jamais la même affaire. »

Depuis, rares sont les journées où il manque son entraînement. « Seulement quand il y a un rush d’ensilage, par exemple, ou quand je suis blessé », dit-il, ajoutant : « Je ne suis plus le même gars qu’il y a huit ans. Je me trouve tellement plus solide qu’avant. Il m’est arrivé de subir une blessure et de me dire : un moment donné, il va falloir que je lâche. Puis j’ai réalisé que ma blessure était due au fait que je travaillais mal. J’ai appris à faire l’exercice autrement et j’ai pu continuer. »

Où trouve-t-on deux heures par jour pour s’entraîner quand on exploite une ferme laitière comportant un troupeau de 185 vaches et qu’on détient un quota de 320 kilos de matières grasses? « On est très bien installés, déclare Martin, qui est associé à son frère. Tout a été pensé pour être efficace. L’alimentation est robotisée, tout comme la traite. D’autre part, on n’élève pas. On achète des vaches qui sont au robot, et donc qui n’ont pas besoin d’être entraînées. En plus, ça nous permet de connaître leur performance dans le détail. »

« On exploite peu de terres, poursuit-il. La ration fourragère comprend 70 % d’ensilage de maïs. La ration des taries est à base d’ensilage de maïs et de paille de céréale hachée qu’on entrepose en grange. »

Martin explique que les deux partenaires ont des intérêts différents. « Mon frère, lui, c’est le social. S’impliquer dans les organisations. » Mais ils poursuivent un même objectif : « La ferme, résume-t-il, on veut en vivre sans y travailler jour et nuit. »

Ce père de deux adolescents n’a aucune intention de délaisser le CrossFit dans un avenir prévisible. « Je vais continuer tant que je vais pouvoir, dit-il. Il me faut ça. Je veux rester le plus en forme possible le plus longtemps possible. La journée où tu n’utilises plus ton corps, c’est fini. Il faut toujours que tu utilises tout ton corps pour demeurer en forme. »

Martin conclut : « Mes idoles, ce sont les gens de 70 ans et plus qui s’entraînent encore et qui performent. »