Dans son allocution, le président des PLQ, Daniel Gobeil, a fait un retour sur les différents travaux qui ont été réalisés par les délégués au cours des deux journées de réflexion. Il a d’abord mentionné que ces derniers ont travaillé ensemble sur l’élaboration de leur planification stratégique qui, a-t-il dit, « va nous donner un enlignement pour les années 2023-2030 afin de demeurer un secteur très compétitif et répondre aux attentes sociétales. » Il a ensuite abordé un sujet qu’il qualifie d’incontournable : le développement durable. M. Gobeil a rappelé que le chantier des PLQ qui mènera à la mise en œuvre d’une stratégie de développement durable a commencé il y a plus d’un an. « On veut se doter d’une politique crédible et respectueuse de la charge de travail des producteurs », a-t-il précisé.
Le financement de l’organisation a aussi été un sujet à l’ordre du jour des journées de réflexion. M. Gobeil a annoncé qu’un plan de financement sera proposé aux producteurs durant la tournée des régions qui aura lieu cet hiver. Des investissements seront nécessaires pour répondre aux besoins des producteurs, financer certains programmes, comme proAction, et assurer la sécurité des données informatiques.
M. Gobeil a, par la suite, parlé de la situation économique actuelle qui affecte grandement les producteurs. Le prix du carburant à la ferme, les coûts de transport du lait et les taux d’intérêt ont notamment des impacts majeurs sur les coûts de production. « On a investi des sommes importantes pour répondre aux attentes de la société, donner plus de bien-être à nos animaux et avoir des fermes plus efficaces quant au temps de travail. Mais il y a aussi des dettes importantes dans nos fermes. C’est un enjeu qu’on prend très au sérieux et sur lequel on va travailler pour sécuriser nos fermes », a-t-il ajouté.
Il a rappelé l’annonce de la CCL d’une hausse de 2,2 % concernant les classes 1 à 4 en février 2023. « Dans la répartition de nos revenus, 65 % de nos composantes sont vendues au prix canadien. L’autre 35 %, tant en matière grasse qu’en solides non gras, est vendu au prix mondial. Donc, l’ajustement de prix de CCL aura un impact sur 65 % de notre lait », a-t-il précisé en rappelant que les prix mondiaux demeurent élevés depuis quelques mois et ont permis de générer des revenus additionnels à la ferme.
Le président des PLQ a également profité de cette tribune pour manifester sa fierté à propos du fait que l’organisation a pu enfin fermer le chapitre des compensations en lien avec l’ACEUM. Le programme annoncé par la ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, Marie-Claude Bibeau, prévoit des versements directs aux producteurs sur la base de leur quota pendant 6 ans, ainsi que deux fonds consacrés à la transformation laitière. Le premier permettra de développer des capacités de transformation laitière dans le but de valoriser les solides non gras (SNG) et le second sera destiné à la transformation. « C’est une bonne nouvelle pour l’industrie laitière! Une bonne nouvelle, à court terme, pour nos liquidités, et à long terme pour s’assurer de répondre à la croissance des marchés! », a déclaré M. Gobeil.
Il a aussi révélé que Marie-Claude Bibeau s’est adressée aux délégués durant les Journées de réflexion et a réitéré sa promesse de ne plus faire de concessions dans les futurs accords commerciaux. « On espère, a lancé M. Gobeil, que cette promesse va être respectée par le Parti libéral du Canada, mais aussi par tous les partis politiques. » Il a conclu : « La pandémie a amené une évidence, celle de s’occuper de la souveraineté et de la sécurité alimentaires. Nous, ça fait des années qu’on parle de ça, mais maintenant les gouvernements le comprennent aussi. »
Bilan de l’année laitière
Rock Éric Hounhouigan, agroéconomiste aux Producteurs de lait du Québec, a présenté le bilan de la dernière année laitière, s’échelonnant du 1er aout 2021 au 31 juillet 2022 ainsi que des données de marché plus récentes (octobre 2021 à septembre 2022). Cette période a été marquée par un ralentissement du marché.
Selon ce bilan, les ventes de lait de consommation ont diminué de 2,3 % comparativement à l’année précédente. On voit donc un retour vers la tendance historique d’avant la crise de la Covid-19. Il a rappelé que les ventes de lait de consommation ont augmenté durant le confinement étant donné que les gens étaient davantage à la maison. Au contraire, les ventes de crème, qui étaient en forte augmentation (6,1 %) avant la crise de la Covid-19, avaient ralenti durant le confinement en raison, notamment, de la fermeture des restaurants. « Dans la dernière année, la croissance des ventes de crème a repris. Par contre, on n’est pas revenu à la croissance qu’on voyait avant la pandémie, on est plutôt autour de 3,9 % », a-t-il poursuivi. Quant aux ventes de fromage et de beurre, elles ont diminué respectivement de 1,9 % et 2,4 % entre octobre 2021 et septembre 2022.
Rock Éric Hounhouigan a ensuite traité la question des besoins totaux canadiens. Ces derniers ont atteint 412,2 millions de kilos de matière grasse en 2021-2022, ce qui représente une augmentation de 0,3 % par rapport à 2020-2021. Par contre, le quota octroyé aux producteurs n’a pas suivi cette hausse, il a plutôt diminué de 0,2 %, en raison principalement des importations qui ont crû au cours de l’année, passant de 12,8 à 15,2 kilos de matière grasse. « On constate que la croissance de la demande canadienne en produits laitiers est plus lente que la croissance des importations », a-t-il précisé. M. Hounhouigan a conclu en soulignant qu’on peut s’attendre à une augmentation du quota aux producteurs de 0 à 1,5 % durant la prochaine année.
Prix et perspectives
Florence Bouchard-Santerre, directrice de la recherche économique aux Producteurs de lait du Québec, a présenté le bilan de la dernière année et des perspectives en matière de prix. Selon ce bilan, dans la dernière année laitière, le revenu à la ferme a été de 87,39 $ l’hectolitre moyen, ce qui représente une augmentation de 5,73 $/hl par rapport à la période précédente. Cette augmentation est principalement due à l’indexation de 8,4 %, octroyée par la Commission canadienne du lait (CCL), le 1er février 2022. Les prix mondiaux très élevés, la hausse des ventes de yogourt et la baisse de la fabrication de beurre ont aussi eu un effet positif sur le revenu. Rappelons que la fabrication de beurre génère des surplus de solides non gras, ce qui affecte le revenu.
La hausse des ventes de crème qui génèrent elles aussi des surplus de solides non gras, le ralentissement des ventes de lait à boire et la baisse de la fabrication de fromage ont eu un impact négatif sur le revenu à la ferme. Florence Bouchard-Santerre a également rappelé que la demande en beurre pour la transformation secondaire a continué sa progression. Ces ventes augmentent le quota, mais font baisser le revenu.
À quoi s’attendre pour la période d’octobre 2022 à septembre 2023? Mme Bouchard-Santerre a présenté deux scénarios. Le plus pessimiste prévoit une baisse de prix de – 1,28 $ l’hectolitre et le plus optimiste, une hausse de 1,14 $ l’hectolitre. Ces prévisions tiennent compte de l’indexation annoncée par la CCL qui entrera en vigueur en février 2023, d’une baisse des ventes de lait de consommation plus ou moins grande selon le scénario et de la demande grandissante pour le beurre en classes spéciales. Il faudra aussi surveiller les prix mondiaux qui continuent d’avoir un effet généralement positif sur le revenu ainsi que les ventes de fromage, dont la croissance aurait également un impact positif.