Fertiliser ses prairies pour en augmenter la qualité

Personne ne peut contester qu’une bonne fertilisation augmente le rendement des plantes fourragères pérennes. Au Québec, le rendement des prairies bien fertilisées peut atteindre de 7 à 12 t MS/ha, tandis que la moyenne provinciale oscille autour de 6 t MS/ha. Mais la fertilisation peut-elle aussi améliorer la qualité?

Récemment, l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA) a complété l’analyse de multiples données en provenance d’essais de fertilisation de prairies au Québec. Lactanet a collaboré à ce projet pour mieux comprendre l’impact de la fertilisation sur la valeur nutritive des fourrages. Sans trop de surprises, c’est surtout sur la teneur en protéine brute que la fertilisation peut avoir un impact majeur.

De l’azote pour des graminées protéinées

L’azote est un élément essentiel pour la fabrication des protéines par les plantes fourragères. Heureusement, les légumineuses ont la capacité de fixer l’azote atmosphérique et ne dépendent généralement pas de la fertilisation en azote. Elles peuvent même fournir de l’azote aux graminées grâce aux exsudats racinaires et à la décomposition des résidus végétaux. Logiquement, l’impact de la fertilisation en azote sur la teneur en protéine des fourrages devrait diminuer avec l’augmentation du pourcentage de légumineuse. C’est ce qu’on a pu observer dans les données (voir la figure 1).

Les données nous indiquent qu’à partir de 31 % de légumineuses, la fertilisation azotée n’a plus d’impact sur la teneur en protéines du fourrage, même s’il peut y avoir un impact sur le rendement dans certains cas. Pour les mélanges à base de graminées (30 % de légumineuses et moins), lafertilisation en azote peut augmenter de façon considérable le pourcentagede protéine (+1,8 à 3,2 unités de %).

Que doit-on retenir de cette figure? D’abord, si on désire avoir beaucoup de protéines, on peut augmenter la proportion de légumineuses. Si on préfère les mélanges à base de graminées pour leur apport en énergie sous forme de fibres digestibles, la fertilisation en azote permet non seulement d’augmenter le rendement, mais aussi la qualité. Pour connaitre la dose d’azote permettant d’optimiser le rendement et la teneur en protéines dans votre situation, consultez votre conseiller en agroenvironnement.

Du soufre pour des luzernes carencées

Dans les années 1990, à cause de la pollution de l’air par le soufre, les sols bénéficiaient d’un apport atmosphérique relativement élevé en cet élément via les pluies acides. Toutefois, étant donné la forte diminution de la pollution atmosphérique en soufre (bonne nouvelle!), les apports sont aujourd’hui beaucoup moins importants qu’avant (voir la figure 2).

La luzerne fait partie des plantes ayant des besoins élevés en soufre. Cet élément lui est indispensable, entre autres pour assurer la fabrication de protéines. Depuis les dernières années, il n’est pas rare d’observer des signes de carence en soufre chez la luzerne. Un moyen simple de vérifier si une luzernière manque de soufre est de regarder les analyses de fourrages. Si la teneur en soufre de la luzerne est inférieure à 0,25 % de la matière sèche, il est probable que celle-ci soit en carence. Dans cette situation, une dose de 25 kg S/ha est recommandée.

Les données du Québec et de l’Ontario confirment qu’une fertilisation en soufre chez des luzernes carencées peut augmenter le rendement (+1 à 4 t MS/ha) et la teneur en protéine brute (+1 à 4 unités de %). Sans oublier l’impact positif sur la teneur en soufre des fourrages, un élément important pour l’alimentation des ruminants. L’amplitude de l’impact positif dépend de la gravité de la carence. Les données actuelles indiquent qu’au Québec, la fertilisation en soufre n’a pas d’effet sur la teneur en protéine brute ou le rendement des mélanges à base de légumineuses non carencées, des mélanges mixtes (31 à 69 % lég.), ou des mélanges à base de graminées.

Des effets indirects à ne pas oublier

Les pratiques permettant d’améliorer la survie à l’hiver des légumineuses pourront aider à maintenir un niveau élevé de protéines dans les fourrages à long terme. En ce qui concerne la fertilisation, il est bien pour que les légumineuses puissent emmagasiner leurs réserves avant l’hiver. Dans les essais québécois, la fertilisation en potassium au printemps et après la première coupe n’a toutefois pas eu d’impact sur la survie des légumineuses, probablement parce que l’apport s’est fait trop
tôt en saison. Cette hypothèse est appuyée par le fait que la teneur en potassium du sol a influencé de façon importante la survie à l’hiver (voir le tableau 1).

Pour une survie optimale des légumineuses, on devrait viser 220 kg K/ha ou plus dans nos sols. De cette façon, les légumineuses auront toujours accès à du potassium lorsqu’elles en auront besoin, particulièrement avant l’hiver. Dans les sols pauvres en potassium, une fertilisation juste après la dernière coupe pourrait améliorer les chances de survie.

Finalement, il ne faut pas oublier que le chaulage et la fertilisation rendent nos plantes fourragères plus compétitives face aux mauvaises herbes. Les prairies bien fertilisées contiennent donc moins de mauvaises herbes, ce qui optimise le niveau d’énergie
et de protéines, tout en améliorant l’appétence.

De nouvelles grilles de fertilisation disponibles!

Le MAPAQ vient de publier de nouvelles grilles de référence en fertilisation des prairies, basées sur les plus récentes données québécoises. Plusieurs importantes mises à jour ont été effectuées, notamment au sujet de la fertilisation azotée. Informez-vous
auprès de votre conseiller en agroenvironnement pour optimiser le rendement et la qualité de vos prairies!